A Max Linder
au Paradis (ou pas)
Devant mon ordi, 12 février 2013.
Pour la sortie de vos films en DVD, j’ai passé quelques jours à parodier Rimbaud.
Voilà une chronique sur la fugacité du rire.
Tout rire de l’esprit arrive au rire du ventre ; éclat tonitruant. De l’esprit à la bedaine, - sourire, ce sont des ironiques, des cyniques. De Socrate à Diogène, de Diogène à Voltaire, tout est rire étouffé, une distraction, étourdissement et satisfaction de brillants philosophes vénérés : Nietzsche est le sain, le joyeux, le clown.- On a beau se réclamer de ses aphorismes, célébrer son éclat de rire, le penseur dionysiaque est toujours aussi mal compris par ses commentateurs sinistres.- Après Nietzsche, la distraction s’alourdit. Elle continue encore ! Raison et gravité. La folie me donne moins de convictions sur l’homme que la vieille France n’a de doute sur sa méthode cartésienne. D’ailleurs, oublions les vieux! Place aux jeunes : le monde est à parcourir et les jours nous sont comptés.
L’animateur est toujours apprécié ; qui l’admire ? Le public !! L’animateur, qui montre avec éloquence qu’un jeu télévisé résume souvent une carrière, plus précisément, la philosophie absente et radotée du présentateur.
Tu ne penses pas donc je ris. Si le rire devient éclat, c’est à cause de ta bêtise. Tu te crois drôle : je cherche un quelconque esprit, rien devant mes yeux, rien pour mes oreilles : tu lances une grosse vanne : le bide vient d’un coup dans la salle, et fait son œuvre sur scène. Si le public ardent ne voit de matière à rire que dans ta nullité, je ne serais pas de ceux qui achètent le DVD de ton spectacle vendu par millions serré pour des années dans les rayons d’un magasin lugubre vantant ton humour ! Du bide, ai-je évoqué, reniflements et toussotements accompagnent la blague. Ensuite, murmures et souffles font échos, lassitudes. L’observation de ce comique enchante les moqueurs : certains veulent répéter cette expérience : - c’est seulement par ironie. L’idiotie commune s’ennuie souvent par manque d’idées, fatalement ; les malins font plaisir à leur cervelet : on lâche un tweet et on crée le buzz : ainsi passe la mode, le malin occupant son vide, étant conscient, devant les petits jeux de téléréalité. Des mannequins, des sportifs : chanteur, comédien, danseuse, ces spécimens ne vivent qu’à la télé !
L’étape primordiale du railleur qui souhaite devenir clown est sa propre dérision, absolue ; il se moque de son corps, il le maltraite, il l’agace, il le néglige. Aussitôt qu’il l’ignore, il est tenu de le maîtriser ; ceci est compliqué : la grâce est de faire croire en sa maladresse ! – Pourtant il doit sublimer son corps : comme les comiques du cinéma muet, splaf ! Voyez un dandy luttant contre le vent et tenant son chapeau avec élégance.
Je crois qu’on doit être mime, se déclarer mime.
Le clown se déclare mime par une grande, énorme et aberrante chute dans tous les sens. Dans la tendresse, la peine, la névrose, il ne trouve pas sa place, il ranime en son cœur chaque bénéfice, afin de provoquer les plus beaux rires.
Merveilleuse joie dont il sent la franchise, la bienveillance, dont il est la santé, la défense, le bienfait, - et le sensible créateur ! – Puisqu’il fait naître l’hilarité ! Car il a maîtrisé son corps, enfin admirable, mieux que tous ! Il fait naître l’hilarité, et lorsqu’il commencerait, fatigué, par oublier la maîtrise de sa chair, il les a fait rire ! Qu’il s’amuse dans sa chute par les jambes lourdes et faibles : arriveront d’autres moqueurs immatures; ils débuteront par la scène où le clown est tombé !